Samedi 28 septembre, 20h30, je ferme la boutique. J'ai travaillé jusqu'à 12h avant la naissance de notre petit bonhomme et franchement ça m'a permis de vivre cet événement "normalement" sans rester trop à la maison et sans trop tergiverser sur ce qui nous attendait. En plus, la boutique c'est un peu chez nous, j'y vois mes clientes, mes amies viennent m'y rendre visite, je m'organise à mon gré. Bref, les dernières semaines de grossesse se sont bien déroulées même en travaillant.

Pourtant ce dernier samedi, je me sens fatiguée et j'ai hâte que l'après-midi se termine. François ne m'a pas accompagnée aujourd'hui. Il est enfin sorti de sa période de thèse et profite du samedi pour aller courir au parc, prendre un pot avec des amis avant de me retrouver à la fermeture. J'ai hâte de rentrer et nous ne traînons pas pour rejoindre la maison. François prépare le repas et je sens les premières contractions qui arrivent. J'ai pas vraiment faim et le repas s'achève sans dessert (rare chez nous :-)). J'ai des contractions toutes les 10 minutes à peu près. On s'installe sur le canapé et on feuillette des albums photos (notamment celui de nos fiançailles et celui du mariage). Vers 23h, on se décide à aller faire un tour au grand parc qui est à côté de chez nous pour voir si les contractions s'accentuent. Progressivement la douleur augmente et les contractions se rapprochent (toutes les 6/8 minutes). J'arrive à les gérer en m'accrochant au cou de François et en basculant mon bassin (un peu comme une danse du ventre), pour faire descendre le bébé. Depuis le début de cette aventure, je souhaite un accouchement le plus naturel possible. Lors de la préparation, je me suis toujours dit que lorsque j'aurais des contractions, autant qu'elles soient les plus efficaces possibles d'où la marche et la bascule du bassin. De retour à la maison, je prend un bain chaud pour voir les contractions se calment. François nous prépare une tisane et j'y glisse une goutte d'huile essentielle de sauge sclarée, connue pour faciliter la naissance (ça fait 4 jours que j'en prend matin et soir dans une infusion). Les contractions ne ralentissent pas, le travail a commencé !!! C'est sans doute demain qu'on aura enfin le plaisir de tenir notre bébé dans nos bras !

On fait une dernière photo avec mon gros bidou !

François rassemble les dernières affaires et on part à pieds pour l'hôpital (nous mettrons 35 minutes pour y arriver) avec tous les bagages pour l'accouchement et le séjour en maternité. Tout au long du trajet je gère les contractions dans les bras de mon François. Nous sommes pris tout de suite en consultation et le verdict tombe : j'ai bien des contractions toutes les 5 minutes, le coeur du bébé bat bien mais le col n'est pas du tout prêt : pas effacé et ouvert seulement de 1cm. Aie, on nous annonce qu'on peut retourner chez nous. La médecin que l'on voit me dit de me détendre (facile avec des contractions toutes les 5 minutes) et que le travail aura sans doute avancé pour mon RDV de contrôle prévu mercredi ??! Ok on est samedi soir, ça fait déjà quelques heures que j'ai des contractions et elle me dit qu'on verra mercredi si ça a avancé. Autant dire qu'on ne rigole plus du tout. On rembarque tout notre bazar et on rentre à la maison en taxi, blasés. Il est 3h.

On arrive à la maison, je tente de me coucher pour essayer de dormir un peu. Les contractions sont chaque fois plus intenses. Je me sens très mal, la douleur s'amplifie, je tremble, je vomis. Je reprend un bain et à chaque contraction François me passe de l'eau chaude sur le ventre. Même avec ça, j'ai du mal à gérer et je commence à ne plus pouvoir me retenir de crier. François me dit qu'on va y retourner. Je me sens pas la force de marcher, je suis mal et je ne sais pas quelle position adopter. Finalement on repart à pieds (je sais au fond de moi que c'est le mieux à faire) à 5h15. Toutes les 2 minutes on s'arrête et je passe la contraction pendue au cou de François. C'est dur et heureusement qu'il fait nuit, j'ai envie de voir personne.

On arrive à l'hôpital à 6h. La sage-femme nous reconnaît de suite et voit que je ne suis plus du tout dans le même état. Impossible de penser au monitoring couchée, je ne le supporterais pas. Elle regarde le col, ouf nous sommes à 3cm ! Youpi, on peut rester, le travail est bien en route. 2 cm de gagné en 3h, on est sur la bonne voie... On met chacun les vêtements de l’hôpital, on sort ce qu'il nous faut pour l'accouchement (boisson, aromathérapie, homéopathie, ...) et pour la naissance (les premiers vêtements de bébé !). La sage-femme lit notre plan de naissance, dedans on détaille nos souhaits pour l'arrivée de notre enfant : peu de lumière, le minimum d'intervention médicale, le souhait d'utiliser la baignoire, le ballon ou tout autre élément pour gérer les contractions, le minimum de bruit au moment de sa naissance, le souhait de faire du peau à peau au plus tôt, la volonté de couper le cordon seulement lorsque celui-ci aura arrêté de battre.

Nous sommes installés dans la salle d'accouchement naturel (elle est dispo, ouf !). C'est une vaste pièce avec un lit au centre et avec une énorme baignoire dans une pièce adjacente. Les lumières sont douces. La sage-femme me parle doucement. Elle nous propose de mettre la musique que l'on a apporté mais pour le moment je n'en ai pas envie. On doit m'administrer un antibiotique comme traitement contre le streptocoque B, une bactérie inoffensive pour moi mais qui ne doit pas se transmettre au bébé lors de sa naissance. Pendant que l'antibio passe, je gère les contractions sur le ballon en m'appuyant au bout du lit. François me masse le bas du dos avec un mélange d'huiles essentielles. Pendant ce temps la baignoire se remplit.

Il est environ 7h lorsque je peux accéder à la baignoire d'eau chaude. Même si les contractions sont toujours fortes, la chaleur est apaisante. Je pense que les tissus se relâchent aussi plus facilement grâce au chaud. Néanmoins, les contractions s'accentuent toujours et elles sont très peu espacées. François est à l'extérieur de l'eau, il me parle et m'encourage. A 8h arrive le changement de sage-femme. Celle de la nuit qui nous a accueilli à 2h et à 8h s'en va et laisse place à sa collègue. A ce moment là, je leur dis une 1ère fois que j'ai envie de pousser. Elles me disent de patienter encore un peu car le prochain toucher pour voir où en est le col sera dans 3/4h. Pourtant cette envie se fait de plus en plus pressante. Je sens la tête du petit qui est là tout près. La sage femme me propose alors de sortir de l'eau et m'essuie avec une grande serviette (l'expulsion dans l'eau n'est pas encore possible dans cet hôpital). Entre mes jambes, je sens mon corps s'ouvrir et je touche la poche des eaux toute ronde. La sage-femme fraîchement arrivée, commence bien sa journée ! Elle me demande alors quelle position je veux adopter pour l'expulsion. Il y a bien cette chaise d'accouchement tout près (en forme de U) mais elle me parait bien basse et je n'ai pas envie de m'asseoir. Finalement, je lui réponds: "debout". On retourne dans la grande salle, nous montons le lit au maximum pour que je puisse m'appuyer dessus entre les contractions. Pendant la contraction, je suis accrochée au cou de François qui me soutient de toute sa force. Je pousse avec force pendant une vingtaine de minutes, tout l'hôpital est au courant mais après 6 ou 8 poussées notre petit garçon arrive parmi nous :-) Il est né dans sa poche, qui ne s'est rompue qu'au moment où lui même est sorti de mon corps. La sage femme l'attrape au dessous de nous puis me dit "regarde Harmonie, c'est ton enfant". Alors je me baisse pour serrer dans mes bras pour la première fois ce petit être que la vie nous confie. Je le prend ensuite tout contre moi et nous pouvons l'observer avec bonheur son papa et moi.

Après cette physique naissance, je m'allonge avec plaisir sur le lit (que j'inaugure donc seulement maintenant). Rapidement le bébé cherche le sein et la sage-femme nous montre comment le positionner pour démarrer l'allaitement. On attend que les contractions reviennent pour aider l'expulsion du placenta. Pendant ce temps, la sage-femme me fait quelques points, seulement en interne. Le placenta ne sort toujours pas. La médecin arrive et m'appuie de toutes ses forces sur le ventre pour le décoller. Je crie et donne des coups de pieds. Elle me dit qu'il faut qu'il sorte rapidement sinon ils seront obligés de m'endormir pour aller le chercher eux mêmes. On leur demande de patienter encore un peu. Vient une nouvelle contraction, je pousse de toutes mes forces et voilà le placenta qui sort. Ouf ! Voilà l'accouchement est bel et bien fini et tout s'est bien passé. On est en bonne forme Léonard et moi donc tout va bien. La sage-femme nous laisse ensuite tous les trois un grand moment pour que nous découvrions notre enfant en intimité.

Pas mal de temps après la sage-femme revient. Elle nettoie un petit peu Léonard puis le pèse et le mesure. Verdict : 3.860kg pour environ 55cm (elle a dû s'y reprendre a deux fois car elle mesurait 58cm en premier lieu !). J'enfile une blouse propre et nous voilà partis tous les trois vers notre chambre à la maternité.

Nous avons beaucoup de chance car, en plus d'être pilote en accouchement naturel, notre hôpital vient d'être entièrement rénové. Les salles d'accouchement ont 2/3 ans et les chambres 3 mois. On bénéficie donc de conditions très appréciables. Nous étions d'abord affectés à une chambre double mais en arrivant celle-ci est bondé par les visites que reçoit déjà le premier nouveau-né de la chambre qui nous est destiné (normal on est dimanche et les visites sont très nombreuses aujourd'hui). François demande à ce qu'on nous mette autre part et heureusement on nous donne une chambre simple, juste pour nous. Tant mieux, ces premiers moments à trois seront d'autant plus agréables pour tous.

C'est parti pour les premières découvertes, les premiers bruits de bébé, les premières couches, les premiers calins, les premières têtées.. Que du bonheur ! Bienvenu chez nous mon petit bonhomme et merci à ton papa d'avoir "accouché avec moi" (je n'aurais pas pu le faire toute seule !)